Dans le cadre des élections régionales en Ile de France, nos associations ont souhaité recueillir la position des candidats des territoires concernés sur l’avenir de la plateforme aéroportuaire de Roissy, ainsi que de l’évolution du trafic aérien en Ile de France. Pour cela, un questionnaire leur a été envoyé par e-mail, et des questions leur ont été posées au cours d’un débat organisé par France Nature Environnement IDF.

Ces questions sont d’autant plus centrales que le trafic aérien en Ile de France pose des questions cruciales en termes de santé publique (jusqu’à 3 années de vie en bonne santé perdues sous les couloirs aériens de Roissy à cause du bruit – Etude Bruitparif février 2019) et en termes d’emplois (90 000 salariés sur cette plateforme aéroportuaire). De plus, malgré l’annonce de l’abandon du Terminal 4 par le gouvernement en février dernier, le président d’ADP a depuis déclaré travailler sur un nouveau projet de Terminal 4 qui verrait le jour d’ici deux ans, sans remettre en cause les perspectives de trafic du projet initial[2].

Le sujet mobilise aussi beaucoup les Franciliens : 45 000 personnes ont signé la pétition contre une extension de l’aéroport de Roissy, et la majeure partie (44%) se dit opposée à tout projet d’agrandissement de cet aéroport (Sondage réalisé par Réseau Action Climat).

Cet article présente les réponses obtenues à travers ces deux démarches. Il n’a pas pour vocation de mettre en avant les positions sur le sujet défendues par les signataires du document, mais de procurer aux électeurs l’opinion des candidat.es de leur territoire sur ce sujet central pour leur futur en Ile de France. Toutes les réponses ont été traitées de la même manière.

Signataires : Collectif Non au T4, ADVOCNAR, France Nature Environnement IDF, Alternatiba Paris, Greenpeace Paris, les Amis de la Terre Paris, les Amis de la Terre Val d’Oise, MNLE 93, Notre Affaire à Tous.

Synthèse

L’ensemble des candidat.es ayant répondu reconnaît l’impact néfaste de l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle sur l’environnement, la qualité de vie et la santé (pollution atmosphérique et sonore) des habitants de la région, et particulièrement des riverains de Roissy.

Si seuls Julien Bayou et Clémentine Autain se prononcent en faveur d’un plafonnement et d’un couvre-feu à Roissy, une large majorité de candidats soutient l’idée d’une réduction progressive du trafic aérien afin de réduire les nuisances subies par les francilien.ne.s ainsi que les émissions de gaz à effet de serre de la région. Seule Valérie Pécresse ne se prononce sur aucun de ces points, évoquant d’éventuels progrès techniques (avions “non bruyants”, aéroport zéro carbone).

La perspective d’une future extension de l’aéroport de Roissy est rejetée par l’ensemble des candidats de gauche et EELV, alors que ceux du centre et de droite ne se prononcent pas.

Enfin, Clémentine Autain et Julien Bayou s’engagent, s’ils sont élus, à ce que la région agisse de manière volontariste pour accompagner une trajectoire de réduction du trafic et pour accompagner la transition du secteur et de ses salariés (diversification, sécurisation des emplois, reconversion…)

Méthodologie

Les têtes de liste aux élections régionales en Ile de France, Nathalie Arthaud (LO), Clémentine Autain (LFI), Julien Bayou (EELV), Audrey Pulvar (PS), Laurent St Martin (LREM), Valérie Pécresse (Soyons libres) et Jordan Bardella (RN), ont d’abord été contactés par e-mail. Ils.elles ont ainsi reçu le questionnaire ainsi qu’une demande de RDV avec nos associations afin d’échanger de vive voix. Clémentine Autain et Julien Bayou ont répondu favorablement à notre demande de rendez-vous et Julien Bayou est le seul à avoir répondu au questionnaire. Audrey Pulvar a quant à elle répondu par un texte précisant ses engagements sur la question du trafic aérien, sans toutefois se prêter au jeu du questionnaire.

Dans un second temps, un débat organisé par France Nature Environnement IDF entre les principaux candidats sur le thème de l’environnement, a permis de recueillir leur position sur deux questions présentes dans le questionnaire:

  •  Êtes-vous contre l’augmentation du trafic aérien à Roissy au-dessus du niveau de 2018-2019 (soit 500 000 mouvements aériens/an) ? (Q3 du questionnaire)
  • Etes-vous pour une réduction programmée du trafic aérien pour atteindre nos objectifs climatiques ? (Question 5)

Nous avons pris en compte les réponses dans ce document.

Seul Jordan Bardella n’a participé à aucun échange permettant de connaître son positionnement.

Restitution

Clémentine
Autain

Julien
Bayou

Audrey
Pulvar

Laurent
Saint-Martin
Valérie
Pécresse

LFIEELVPSLREMSoyons
Libres
Q1 – Reconnaissez-vous l’impact négatif actuel de l’aéroport de Roissy sur le climat et la santé des populations survolées (bruit, pollution atmosphérique) ?Oui*OuiOuiOui*Oui*
Q2 – Êtes-vous opposé.e à tout projet d’infrastructure (extension, aménagement) qui permettrait la croissance du trafic passager ou fret à l’aéroport Roissy Charles de Gaulle, afin de protéger le climat et la santé des francilien.ne.s ?Oui**OuiOuiNe se
prononce
pas*
Ne se
prononce
pas*
Q3 – Êtes-vous contre l’augmentation du trafic aérien à Roissy au-dessus du niveau de 2018-2019 (soit 500 000 mouvements aériens/an) dans le cadre des infrastructures existantes ?Oui**OuiOuiOui*Ne se
prononce
pas*
Q4 – Etes-vous favorable à la mise en place d’un plafonnement et à l’instauration d’un couvre-feu à Roissy, comme c’est aujourd’hui le cas à Orly ?Oui**OuiNe se
prononce
pas*
Ne se
prononce
pas*
Ne se
prononce
pas*
Q5 – Considérez-vous que le trafic des aéroports d’Ile-de France (Roissy et Orly) doit être conditionné à une trajectoire de réduction des gaz à effet de serre compatible avec l’Accord de Paris (scénario à 1,5°C) ?Oui*OuiOuiOui*Ne se
prononce
pas*
Q6 – Vous engagez-vous, une fois élu.e, à ce que la région influe activement pour la mise en place des mesures ci-dessus ?Oui**OuiOui
Q7 – Vous engagez-vous à ce que la région accompagne localement le secteur aérien et ses salarié.es dans le sens d’une transition écologique et sociale (diversification des activités hors aérien, sécurisation des emplois et aide à la reconversion des salariés) en parallèle du développement de technologies moins carbonées ?Oui**OuiOui
* Données issues du débat FNE-IDF
** Données issues d’un entretien avec le/la candidat.e

CITATIONS EXTRAITES DU DÉBAT

Jill-Maud Royer pour Clémentine Autain, LFI

“L’objectif du plafonnement au niveau de 2019 est atteignable. A l’Assemblée Nationale, nous avions beaucoup parlé de la proposition de loi que nous avions déposée pour interdire les trajets faisables en train. Nous nous battons pour la réduction du transport aérien, on s’est battus contre le T4 à Roissy. Nous ne pensons pas qu’il soit possible de construire un transport aérien décarboné, en tout cas pas à l’horizon des cinq prochaines années donc cet objectif est évidemment nécessaire.”

Julien Bayou, EELV

“Il faut absolument plafonner les mouvements, en commençant par un couvre-feu la nuit. La crise actuelle est une opportunité inespérée pour engager la transition des transports internationaux, du tourisme et de la diminution globale du trafic aérien. Ce n’est pas la seule façon d’alléger l’impact carbone de l’aviation mais on ne pourra jamais tenir les +2°C des Accords de Paris sans une telle modération.
Ce qu’il faudrait alors, parce qu’on ne mène une transition écologique qu’en appliquant le principe de justice sociale, c’est changer l’accès aux voyages aériens. Nous ne voulons pas priver les jeunes d’opportunités d’études ou de carrière internationale, ni empêcher les gens de réaliser le voyage de leur vie, à la rencontre du monde. C’est surtout le trafic “excessif” des plus fortunés qui doit être plafonné.“

Retrouver les réponses de Julien Bayou au questionnaire ici.

Audrey Pulvar, PS

“Je suis pour la réduction programmée du trafic aérien. Sur le nombre exact je ne me suis pas assez penchée sur ça pour dire pour ou contre les 500 000 mouvements. Mais ça mérite d’être étudié. Je soutiens l’abandon des lignes intérieures quand il existe une alternative en train de 3h30 ou moins. C’est beaucoup plus ambitieux que la loi climat. L’urgence est un couvre-feu à Roissy comme il existe à Orly.”

Retrouvez la réponse d’Audrey Pulvar au questionnaire ici.

Juliette Espargilière pour Laurent Saint Martin, LREM

“Nous sommes favorables à l’implantation d’expérimentations avec des radars sonores. En effet [l’aéroport de Roissy] est une nuisance importante dans le Val d’Oise, il y a des associations qui travaillent sur le sujet, qui travaillent sur la souffrance des habitants qui vivent autour, donc c’est un vrai sujet.
Le deuxième vrai sujet c’est le zéro émission nette. Le trafic aérien c’est énormément de pollution, c’est une emprise au sol des aéroports énorme également et une concentration d’emploi sur le territoire qui n’est pas forcément en adéquation avec la population. Pour toutes ces raisons, je suis favorable à ce qu’on travaille à une réduction progressive du trafic, compensée par le train.”

Jean-Philippe Dugoin-Clément pour Valérie Pécresse, Soyons libres

“La réalité c’est que la crise de la covid a entraîné une chute du trafic aérien de l’ordre de 70%, et selon les études nous avons jusqu’à entre 2024 et 2027 pour revenir potentiellement à l’état antérieur. Nous souhaitons utiliser cette période pour travailler sur l’avenir du transport aérien, qui perdurera, mais aller vers l’avion non bruyant, l’aéroport zéro carbone, mieux intégré dans le tissu urbain. Utilisons ces trois années que nous avons devant nous pour préparer les choses sereinement.”

L’intégralité du débat organisé par France Nature Environnement IDF est disponible ici